Cour d'appel de Papeete, 12 mai 2016, n° 15/00238

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Papeete, 12 mai 2016, n° 15/00238
Juridiction : Cour d'appel de Papeete
Numéro(s) : 15/00238
Décision précédente : Tribunal du travail de Papeete, 28 avril 2015, N° 15/00056;F14/00051;15/00077

Sur les parties

Texte intégral

N° 49

CT


Copie exécutoire

délivrée à :

— Me H. Auclair,

le 12.05.2016.

Copie authentique délivrée à :

— Me Grattirola,

le 12.05.2016.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Sociale

Audience du 12 mai 2016

RG 15/00238 ;

Décision déférée à la Cour :jugement n° 15/00056, Rg n° F 14/00051 du Tribunal du travail de Papeete du 29 avril 2015 ;

Sur appel formé par déclaration reçue au greffe du Tribunal du Travail de Papeete sous le n° 15/00077 le 15 mai 2015, dossier transmis et enregistré au greffe de la Cour d’appel le 19 mai 2015 ;

Appelant :

Monsieur X H, enseigne commerciale 'The Black Pearl Center', inscrite au registre du commerce et des sociétés de Papeete sous le n° 43038 A, XXX, né le XXX à XXX, de nationalité française, demeurant XXX

Représenté par Me Hina GRATTIROLA, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

Mademoiselle I Z, née le XXX à XXX

Représenté par Me Olivier HERRMANN-AUCLAIR, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 5 février 2016 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 3 mars 2016, devant Mme TEHEIURA, conseillère faisant fonction de présidente, Mme LEVY, conseillère, Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme C ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé publiquement ce jour par Mme TEHEIURA, présidente, en présence de Mme K-L, greffier, lesquels ont signé la minute.

A R R E T,

I Z a été engagée par X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center », en qualité de vendeuse.

Par lettre du 23 octobre 2013 signifiée le 24 octobre 2013, elle a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave devant avoir lieu le 31 octobre 2013 et a fait l’objet d’une mise à pied conservatoire.

Elle a été licenciée pour faute grave par lettre du 4 novembre 2013 signifiée le 6 novembre 2013 ainsi rédigée :

« Vous étiez convoqué à un entretien préalable le 31 octobre 2013 auquel vous avez refusé de participer.

Je vous informe que j’ai décidé de vous licencier pour les faits suivants:

Vous avez à plusieurs reprises volé des espèces qui se trouvaient dans la caisse, ce qui nous a été confirmé par une des employées.

Vous avez profité de mon départ précipité en Nouvelle Zélande le 1er octobre 2013, pour accompagner mon fils évasané suite à un accident grave, situation dont vous aviez parfaitement connaissance, mon fils étant dans le comas depuis quelques jours déjà, pour abandonner votre poste et aller travailler chez un concurrent de la place Te Vai Création.

La lettre de convocation vous a d’ailleurs été remise chez votre nouvel employeur.

Enfin, vous avez insulté et menacé une de mes vendeuses pendant ses heures de travail et alors que je me trouvais toujours en Nouvelle Zélande. Cette dernière s’est vue contrainte de déposer une main courante à la Police et est extrêmement traumatisée au point qu’elle ne veut plus rester seule dans la Boutique.

Ces faits sont constitutifs d’une faute grave.

Je suis donc contraint de mettre fin à votre contrat de travail.

La date de présentation de cette lettre fixera le point de départ du préavis d’un mois au terme duquel votre contrat de travail sera définitivement rompu. »

Par jugement rendu le 29 avril 2015, le tribunal du travail de Papeete a :

— dit que I Z a été engagé le 5 octobre 2010 par X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center » ;

— dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et abusif ;

— alloué à I Z :

* la somme de 192 000 FCP nets, à titre d’indemnité compensatrice de congés payés ;

* la somme de 160 000 FCP nets, à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

* la somme de 16 000 FCP nets, à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

* la somme de 1 280 000 FCP, à titre d’indemnité pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

* la somme de 320 000 FCP, à titre d’indemnité pour licenciement abusif ;

* la somme de 960 000 FCP, à titre d’indemnité pour rupture d’un travail dissimulé ;

* la somme de 300 000 FCP, à titre de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité ;

* la somme de 120 000 FCP, sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

— dit que les décisions relatives à l’indemnité compensatrice de préavis, à l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et à l’indemnité compensatrice de congés payés sont exécutoires de plein droit par provision ;

— accordé l’exécution provisoire pour le surplus à hauteur de 2 000 000 FCP ;

— enjoint à X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center », de déclarer à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française les salaires pour la période d’octobre 2010 au 15 février 2011, l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et l’indemnité compensatrice de congés payés ;

— mis les dépens à la charge de X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center ».

Par déclaration faite au greffe du tribunal du travail de Papeete le 18 mai 2015, X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center », a relevé appel de cette décision afin d’en obtenir l’infirmation.

Il demande à la cour de :

— dire le licenciement régulier et fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

— rejeter les prétentions de I Z ;

— condamner I Z à lui payer :

* la somme de 160 000 FCP, à titre d’indemnité de préavis ;

* la somme de 746 394 FCP, correspondant aux cotisations sociales de février 2011 à novembre 2013 ;

* la somme de 226 000 FCP, sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

— condamner I Z à payer à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française la part de charges salariales relatives au supplément de salaire versé.

Il soutient qu’il a engagé I Z à compter du 16 février 2011 et que la preuve de l’existence d’un contrat de travail ayant débuté le 5 octobre 2010 n’est pas rapportée ; qu’il a procédé à la déclaration nominative préalable à l’embauche prévue par l’article Lp. 5611-1 du code du travail de la Polynésie française ; qu’il a remis des bulletins de salaire à I Z ; que « les heures mentionnées sur les bulletins de salaire correspondent aux heures de travail « réellement effectuées » ; qu’en effet, s’il « reconnaît avoir versé à Mlle Z 160 000 FCP de salaire mensuel au lieu de 149 491 FCP brut », « cette différence n’est pas liée au nombre d’heures travaillées mais exclusivement à une faveur’consentie » par lui ; qu’il « réglait ainsi chaque mois 10 509 FCP de plus ainsi que les charges salariales » mensuelles ( 22 618 FCP ) ; que I Z ne rapporte pas la preuve de l’existence d’heures supplémentaires ; que « les bulletins de paie de janvier et février 2013 produits par Mlle Z’ont été obtenus sous la contrainte de l’inspection du travail, elle-même sous la contrainte de Mlle Z qui ne cesse de se rendre dans leurs bureaux » ; qu’il ne peut donc lui être reproché des faits de travail clandestin ; que I Z lui est redevable de la somme de 746 394 FCP, au titre des charges salariales et qu’il régularisera la situation à l’égard de la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française ; que I Z a perçu une indemnité de congés payés s’élevant à la somme de 160 000 FCP ; qu’elle « n’a subi aucun préjudice ni aucun accident du travail dans le sens où sa sécurité et sa santé ont toujours été assurées » et que sa demande d’indemnité pour manquement à l’obligation de sécurité de résultat est dépourvue de fondement juridique.

Il ajoute que I Z n’établit pas l’existence d’un licenciement verbal ; que, ni son courrier du 30 septembre 2013, ni la lettre de son conseil, ni l’attestation de Heimanu Y ne possède de valeur probante ; que, profitant de son départ en Nouvelle-Zélande où se trouvait son fils victime d’un grave accident, I Z a quitté l’entreprise pour aller chez un autre bijoutier ; qu’elle n’a pas « été empêchée de venir travailler le 30 septembre et les jours suivants » et qu’à cette époque, il ne se trouvait pas en état de gérer sa boutique, ni de prendre une décision ; que le licenciement est justifié par un abandon de poste, un vol et l’agression de la vendeuse et que I Z a refusé d’exécuter le préavis.

I Z demande à la cour de confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions tout en sollicitant le paiement de :

— la somme de 390 400 FCP, à titre d’indemnité compensatrice de congés payés ;

— la somme de 800 000 FCP, à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

— la somme de 200 000 FCP, sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Elle fait valoir que le courrier déposé le 30 septembre 2013 à l’inspection du travail, les deux courriers envoyés par son conseil à l’employeur les 4 et 24 octobre 2013, son relevé téléphonique du 30 septembre 2013 et l’attestation d’un collègue de travail, Mr Y rapportent la preuve du licenciement verbal dont elle a fait l’objet et qui ne peut être régularisé ultérieurement par lettre ; que les faits qui lui sont reprochés ne sont ni exacts, ni démontrés et qu’elle a été licenciée dans des conditions brutales et vexatoires ; qu’elle « a commencé à travailler dans l’entreprise le 5 octobre 2010 sans avoir été déclarée à la CPS et sans recevoir de bulletins de salaire » ; qu’elle a toujours travaillé 169 heures par semaine mais qu’à de nombreuses reprises, son employeur a déclaré un horaire inférieur ; que celui-ci ne lui a jamais remis de bulletins de salaire et que des faits de travail dissimulé sont donc établis ; que, comme toutes les vendeuses, elle percevait une rémunération nette de 160 000 FCP et que X H ne lui a jamais accordé de faveur ; qu’au moment du licenciement, il lui était dû 61 jours de congés, soit la somme brute de 390 400 francs FCP et qu’ayant perçu la somme de 160 000 FCP au titre des congés payés, elle reste créancière de la somme nette de 230 400 FCP ; que, « l’employeur tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés dans l’entreprise, doit en assurer l’effectivité » ; qu’elle n’a jamais passé de visite médicale d’embauche et qu’elle n’a pu bénéficier ni d’une visite médicale de reprise à l’issue de son congé maternité, ni du congé prénatal de 6 semaines prévu par la loi.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 février 2016.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’appel :

La recevabilité de l’appel n’est pas discutée et aucun élément de la procédure ne permet à la cour d’en relever d’office l’irrégularité.

Sur la date d’embauche :

I Z a été engagée par X H sans contrat écrit.

Elle a été déclarée par son employeur à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française à compter du mois de février 2011.

Toutefois, les attestations précises et concordantes de Nare TURI épouse A, de XXX, de XXX et de E Z épouse D suffisent à établir que I Z a commencé à travailler en qualité de vendeuse pour le compte de X H au mois d’octobre 2010, époque de la foire artisanale qui s’est tenue à l’assemblée de la Polynésie française et qu’elle exerçait ses fonctions notamment à la boutique.

Le jugement attaqué sera donc confirmé en ce qu’il a dit que I Z a été engagé le 5 octobre 2010 par X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center ».

Sur le montant du salaire :

Les relevés bancaires versés aux débats font ressortir que I Z percevait régulièrement un salaire d’un montant de 160 000 FCP.

X H ne conteste pas qu’il lui versait cette somme mensuellement et ne justifie ni qu’il prenait en charge les cotisations salariales, ni qu’il versait à la salariée une prime de l’ordre de 10 000 FCP.

Dans ces conditions, c’est à juste titre que le tribunal du travail a fixé le montant de la rémunération mensuelle nette de I Z à la somme de 160 000 FCP et qu’il a enjoint à X H de régulariser sur cette base la situation de l’intimée à l’égard de la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française.

Sur la rupture du contrat de travail :

Le 30 septembre 2013, I Z a écrit à X H en lui rappelant que, le jour même à 8h 05, il lui avait téléphoné en lui disant de « dégager » et en lui reprochant des vols dans la boutique.

Elle lui demandait également de lui faire connaître sa situation réelle.

Cette lettre a été remise à une collègue de travail ainsi qu’à l’inspection du travail.

Si X H affirme ne pas avoir tenu les propos que lui prête l’intimée, il ne conteste pas néanmoins l’appel téléphonique.

Celui-ci est confirmé par les relevés versés aux débats et par l’attestation de Heimanu Y dont aucun élément ne permet de remettre en cause l’exactitude.

Cette attestation fait également ressortir que, le 30 septembre 2013, après avoir reçu un appel téléphonique au moment de l’ouverture de la boutique, I Z est partie en pleurs en disant « X vient de me foutre dehors ».

Le caractère sincère du contenu de la lettre du 30 septembre 2013 est conforté par le fait que I Z évoque des vols qui lui seront reprochés dans la lettre de licenciement.

Par ailleurs, si X H était légitimement préoccupé par l’état de santé de son fils, il n’en demeure pas moins que l’activité de l’entreprise et donc sa gestion n’ont pas cessé ; que I Z n’a pas reçu de réponse à son courrier du 30 septembre 2013 ; qu’elle n’a pas été mise en demeure de revenir travailler et que l’employeur ne saurait donc lui faire grief d’avoir cherché un emploi.

Enfin, bien que X H ait engagé une procédure de licenciement le 24 octobre 2013, il doit être souligné que le certificat de travail signé par lui du 11 décembre 2013 mentionne le 30 septembre 2013 comme date de fin du contrat de travail.

Dans ces conditions, I Z rapporte la preuve qu’elle a fait l’objet d’un licenciement verbal le 30 septembre 2013.

La rupture du contrat de travail est donc intervenue sans respect de la procédure de licenciement prévue par le code du travail de la Polynésie française et notamment son article Lp. 1222-9 qui impose l’envoi d’une lettre motivée.

Il s’agit ainsi d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

Ce licenciement présente également un caractère abusif puisqu’il a eu lieu brutalement par téléphone et dans des conditions vexatoires, l’employeur ayant mis en doute l’honnêteté de I Z.

Sur l’indemnisation du licenciement :

L’article Lp. 1225-4 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« Lorsque le licenciement a été prononcé en l’absence de motif réel et sérieux, le tribunal peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise dans les conditions précédentes d’exécution du contrat de travail.

En cas de refus par l’une ou l’autre des parties, le tribunal octroie au salarié ayant douze mois d’ancienneté dans l’entreprise, une indemnité.

Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois précédant la rupture.

Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité prévue par l’article Lp. 1224-7 ».

L’article Lp. 1222-23 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« Dans le cas où le licenciement n’est pas motivé par une faute lourde ou grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée varie en fonction de l’ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur.

Les durées de l’ancienneté de service et du préavis sont fixées par arrêté pris en conseil des ministres ».

L’article A. 1222-1 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« Lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le préavis est fixé comme suit :

1. Si l’ancienneté de services continus chez le même employeur est inférieure à cinq ans :

a. pour les ouvriers et les employés payés au mois, le préavis est fixé à un mois ».

L’article Lp. 1225-3 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« En cas de démission ou de licenciement, hormis pour faute grave ou faute lourde, l’inobservation du préavis, lorsqu’il est prévu, ouvre droit au profit du salarié ou de l’employeur, à une indemnité compensatrice dont le montant est égal au salaire dû au titre de la durée du préavis non effectué.

Dans le cas d’un licenciement, cette indemnité ne se confond pas avec l’indemnité de licenciement prévue à l’article Lp. 1224-7 ».

L’article Lp. 1225-5 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« La rupture d’un contrat de travail à durée indéterminée par le salarié ou par l’employeur ouvre droit à des dommages et intérêts si elle est abusive’ ».

Compte-tenu de son salaire, de son ancienneté et des circonstances du licenciement, il doit être alloué à I Z :

— la somme de 160 000 FCP nets, à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

— la somme de 16 000 FCP nets, à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

— la somme de 1 280 000 FCP, à titre d’indemnité pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

— la somme de 320 000 FCP, à titre d’indemnité pour licenciement abusif.

Sur le travail clandestin :

L’article 8 de la loi du Pays n° 2006-20 du 28 novembre 2006 relative à la création d’une déclaration préalable à l’embauche et à la lutte contre le travail clandestin et l’article Lp. 5611-1 du code du travail applicable à compter du 1er août 2011 disposent que :

« Est réputé clandestin l’exercice d’une activité lucrative de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou de commerce par toute personne, physique ou morale, qui, intentionnellement :

1. soit ne procède pas aux formalités obligatoires d’enregistrement de cette activité ou aux déclarations fiscales, parafiscales ou sociales inhérentes à sa création ou à sa poursuite ;

2. soit ne procède pas à la déclaration nominative préalable à l’embauche de chaque travailleur qu’elle emploie ;

3. soit ne remet pas un bulletin de salaire à chacun des travailleurs qu’elle emploie, lors du paiement de sa rémunération ;

4. soit, satisfaisant à ces obligations, délivre, même avec l’accord du travailleur, un bulletin de salaire mentionnant un nombre d’heures de travail inférieur au nombre d’heures réellement effectuées, ou déclare à la Caisse de prévoyance sociale un nombre d’heures de travail inférieur au nombre d’heures réellement effectuées. »

En cas de violation de ces dispositions, l’article 10 de la loi du Pays n° 2006-20 du 28 novembre 2006 et l’article Lp. 5611-12 du code du travail de la Polynésie française prévoient que « le salarié’a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, à moins que l’application d’autres dispositions légales ou réglementaires ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable. »

En l’espèce, du mois d’octobre 2010 au mois de janvier 2011, X H n’a pas déclaré I Z à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française et il ne lui a pas délivré de bulletins de salaire.

Il ne justifie pas non plus avoir remis à la salariée la totalité des bulletins de salaire à compter du mois de février 2011.

Il n’a jamais déclaré à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française un salaire correspondant à une rémunération nette de 160 000 FCP.

Et les bulletins de salaire des mois de janvier et février 2013, que X H ne démontre pas avoir signé sous la contrainte, font ressortir qu’a été déclaré à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française pour ces deux mois un nombre d’heures de travail inférieur au nombre d’heures réellement effectuées.

Des faits de travail clandestin sont ainsi caractérisés.

Par ailleurs, X H ne peut sérieusement se prévaloir de l’absence d’élément intentionnel alors qu’il exploite une entreprise employant plusieurs salariés ; qu’il connaît la réglementation en matière sociale et qu’il ne pouvait ignorer ses obligations à l’égard de I Z.

Il doit donc être alloué à celle-ci la somme de 960 000 FCP, à titre d’indemnité forfaitaire pour travail clandestin.

Sur les congés payés :

L’article Lp. 3231-1 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« Tout salarié a droit chaque année à un congé payé à la charge de l’employeur à raison de deux jours et demi ouvrables par mois de travail ».

Article Lp. 3231-2 du même code dispose que :

« Lorsque le nombre de jours ouvrables calculé conformément à l’article Lp. 3231-1 n’est pas un nombre entier, la durée du congé est portée au nombre entier immédiatement supérieur. »

L’article Lp. 3231-16 du même code dispose que :

« L’indemnité afférente aux congés prévus à l’article Lp. 3231-1 est égale au dixième de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période pendant laquelle il a acquis ses droits à congé, y compris l’indemnité de congé de l’année précédente.

Cette indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler ».

L’article Lp. 3231-14 du même code dispose que :

« La durée des congés pouvant être pris en une seule fois n’est pas inférieure à 12 jours ouvrables et n’excède pas 24 jours ouvrables.

Il peut être dérogé individuellement à cette disposition d’accord parties ».

L’article Lp. 3231-19 du même code dispose que :

« Lorsque le contrat de travail est résilié avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit pour la fraction de congé dont il n’a pas bénéficié, une indemnité compensatrice déterminée d’après les dispositions de l’article Lp. 3231-16.

En dehors de ce cas, est nulle et de nul effet toute convention prévoyant l’octroi d’une indemnité compensatrice au lieu et place du congé ».

Il résulte de ces textes que les congés payés doivent être pris chaque année et il n’est versé aux débats aucun document contractuel, ni conventionnel modifiant cette règle à l’égard de I Z.

Une indemnité compensatrice de congés payés ne concerne que le congé de l’année en cours au moment de la fin de la relation de travail et, éventuellement, les congés pris et non rémunérés les années antérieures.

Un salarié ne peut réclamer paiement d’une indemnité de congés payés tenant lieu de salaire correspondant à une période durant laquelle il a travaillé et a été rémunéré en contrepartie de son travail.

Or, pour les années antérieures à 2013, I Z ne réclame pas la rémunération de congés pris, ni des dommages-intérêts réparant le préjudice subi du fait de la privation de congés.

Ayant été licenciée le 30 septembre 2013, elle peut prétendre au versement d’une indemnité compensatrice de congés payés d’un montant de 144 000 FCP ( 160 000 FCP x 9 : 10 ).

Dans la mesure où elle reconnaît avoir perçu la somme de 160 000 FCP au titre des congés payés, sa demande en paiement de la somme de 390 400 FCP ou de 230 400 FCP sera rejetée.

Sur le manquement à l’obligation de sécurité de résultat :

L’article 28 de la délibération n° 91-28 AT du 24 janvier 1991 applicable au mois d’octobre 2010 dispose que :

« Tout salarié fait l’objet d’un examen médical avant l’embauchage ou au plus tard trente (30) jours après son engagement. »

L’article A. 4623-20 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« Une action en santé au travail renforcée est assurée pour :

3. les femmes enceintes’ ».

L’article A. 4623-21 du même code dispose que :

« Les salariés bénéficient d’une visite médicale de reprise :

2. après un congé de maternité’ ».

L’article Lp. 1243-1 du même code dispose que :

« Les salariées ne peuvent être occupées pendant une période de huit semaines au total avant et après leur accouchement’ ».

X H ne conteste ni l’absence de visite médicale d’embauche, ni le défaut de visite médicale de reprise après le congé de maternité de I Z, ni le non-respect de l’arrêt de 8 semaines au moment de l’accouchement.

Or, en application de l’article Lp. 4121-1 du code du travail de la Polynésie française, l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat envers ses salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l’entreprise.

En l’espèce, X H n’a pas pris les initiatives qui lui étaient imposées pour prévenir les risques professionnels auxquels était exposée I Z.

Ce manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat cause nécessairement un préjudice à la salariée qui doit être indemnisé par le versement de la somme de 300 000 FCP, à titre de dommages-intérêts.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de I Z la totalité de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel et il doit ainsi lui être alloué la somme de 200 000 FCP, sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

La partie qui succombe doit supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort ;

Déclare l’appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 29 avril 2015 par le tribunal du travail de Papeete, à l’exception de ses dispositions relatives à l’indemnité compensatrice de congés payés et aux frais irrépétibles ;

Rejette la demande formée par I Z au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés ;

Dit que X H, à l’enseigne 'The Black Pearl Center ' doit verser à I Z la somme de 200 000 FCP, au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

Rejette toutes autres demandes formées par les parties ;

Dit que X H, à l’enseigne « The Black Pearl Center » supportera les dépens d’appel.

Prononcé à Papeete, le 12 mai 2016.

Le Greffier, La Présidente,

signé : M. K-L signé : C. TEHEIURA

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour d'appel de Papeete, 12 mai 2016, n° 15/00238